Rencontre: un point sur les championnats du monde avec Arthur Guerin Boeri

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Si chez les femmes, l’année 2015 aura été marquée côté CMAS par les nombreux titres et la polyvalence de l’italienne Alessia Zecchini. Chez les hommes, il y a un français qui aura aussi réussi à marquer clairement les esprits par une polyvalence et une capacité à performer quasi systématiquement au plus fort de l’évènement, c’est Arthur Guerin Boeri. Une médaille d’or aux mondiaux indoor et un record du monde en DNF, et il y a un peu plus d’une semaine le français réitère avec une médaille d’or et un record du monde en Jump Blue, pas de doutes Arthur fait une véritable boulimie d’or ! Nous avons voulu une fois de plus le rencontrer et il s’est prêté une fois de plus au jeu des questions:

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1 – Tu es arrivé en même temps que le reste de l’équipe de France à Ischia. Comment s’est passée cette arrivée ?

Arthur Guerin Boeri : L’arrivée à Ischia était au top, ça a été géré de manière exemplaire par Aurélie Lescure du service secrétariat de la fédé qui se charge d’organiser nos déplacements, et que je remercie au passage. L’île est magnifique. L’ambiance était vraiment Grand Bleu. Petites ruelles, maisons blanches de partout, ça parle Italien etc. J’ai trouvé que l’ambiance était très semblable au film c’était marrant. Vue magnifique sur la mer depuis l’hôtel. C’était top pour se mettre dans la concentration de la compète.

– pas trop long d’attendre en voyant les copains performer chaque jour ? D’autant que si je ne m’abuse tu étais plutôt affuté en constant ?

Oui, c’est long de voir les copains passer. Mais ça donne encore plus l’envie de « perfer » le dernier jour. J’ai vécu une expérience similaire à Kazan il y a 2 ans. Mais attendre permet de bien s’imprégner du lieu, d’évacuer le stress. Je ne suis pas encore vraiment « affuté » pour le constant. Disons que il y a peut-être une carte à jouer avec un potentiel, mais que je dois y aller doucement pour ne pas bruler les étapes. Je vais donc reprendre la prépa profondeur cette année là où je l’ai laissée.

2 – Arrive le soir des annonces du Jump Blue et l’on entrevoit clairement qu’il y a un truc à faire pour toi comme pour Xavier. Stratégie ?

La répartition des annonces a été effectivement stratégique et mise au point avec le staff. De Vincent en premier à Xavier en dernier, l’idée était de mettre une certaine pression sur nos principaux adversaires.

 arthur guerin boeri jump

3 – Vendredi 9 octobre c’est le grand jour, les conditions ont semblé un peu raides ?

Les conditions étaient OK. La visibilité n’avait pas été aussi bonne depuis le début du séjour. Et en surface Arnaud PONCHE qui m’accompagnait sur la perf a fait en sorte que les vagues ne me gênent pas sur ma ventilation, et surtout ma dernière inspiration.

– lorsque tu passes tu sais que pas mal de bons apnéistes sont passés à travers. Tu t’élances, tu nous racontes ?

Je me suis très peu entrainé pour le jump, j’y suis vraiment allé aux sensations en réalité. J’ai réalisé un protocole de départ perf max DYN en piscine, ce qui commence dés que je me lève minimum 4-5h avant. Avec un réveil musculaire, quelques mixtures (recette perso), quelques étirements thoraciques mais légers, puis des statiques PV sur le bateau peu avant le départ. J’étais très détendu avant de partir. La prépa m’avait plongé dans cet état de concentration et d’auto hypnose si nécessaire au bon déroulement d’une perf. J’appréhendais un peu car 3 jours plus tôt j’avais été très en difficulté à l’entraînement. Les 2 tours étaient difficilement passés. D’où l’importance de la prépa et du conditionnement mental. Un fois au fond, j’ai commencé à tourner en ayant en tête de me focaliser sur la sensation de glisse, en restant le plus aquatique possible. En laissant aller mes bras et le reste de mon corps de manière intuitive pour rester le plus fluide possible, notamment sur les virages. Cela m’a permis de rester dans l’économie d’énergie et surtout dans le plaisir, notion importante même en compète. J’ai réussi à garder une vitesse constante jusqu’à la fin, et ma sortie a été très fraiche. Je pense que j’étais vraiment au top ce jour là et j’avais encore une ou deux longueurs sans risque devant moi. Je me souviens de ma sortie. (tout est dit)

 medailles arthur

4 – 201m, un record du monde et une médaille d’or, ça fait quoi ?

C’est toujours un plaisir et une grande fierté. C’est ma première expérience en mer. C’est encourageant de commencé par un titre.

 

5 – Pour cette année, te voilà avec ta deuxième médaille d’or. Tout prouve une sacré polyvalence et un belle boulimie d’or là ?

C’est magnifique de doubler et je boucle une saison dont je suis très satisfait. J’ai toujours du mal à réaliser ce qui se passe dans ces moments là. L’ampleur de ce que j’accomplis résonne surtout au niveau personnel. Même si c’est vrai la couleur de la médaille fait plaisir, et surtout le drapeau qui se hisse avec la Marseillaise. Je suis très heureux à chaque fois de porter le maillot Français à l’international, et je reste fière des couleurs que je porte en toutes circonstances. On pourra parler de polyvalence lorsque j’aurai vraiment progressé en CWT.

6 – On t’a vu très proche de Xavier lors de ta phase de préparation, un plus de profiter de son expérience ?

 C’est toujours un plaisir de retrouver le Doc ( NDLR: Xavier Delpit est médecin/ chirurgien de la main en plus d’être apnéiste) sur les compètes. On est très potes. On aime s’entrainer ensemble. Ses conseils techniques sont importants, mais sous l’eau lors de la perf  j’ai tout oublié et je me suis laissé guider par un mouvement intuitif.
podium jump blue

7 – Le voici à tes côtés à la 3ème place, un doublé sur le podium ! Vous faites fort là !

 C’est une grande joie de voir flotter deux drapeaux tricolores en même temps. C’est assez rare. Ravi d’avoir Xavier à mes cotés sur ce podium.

8 – La saison 2015 est finie pour autant la nouvelle saison commence à pointer son nez. Tes objectifs pour cette nouvelle saison ?

Plein de nouveaux objectifs. Améliorer ma tolérance au CO2 pour allonger ma zone de confort, passer les 7′ en stat, me lester convenablement en dnf (lol) et virer à 200m, virage à 250m en dyn, et évidemment les championnats d’Europe l’année prochaine, et pourquoi pas les mondiaux AIDA par équipe, on y pense avec Alex.

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9 – Au delà du côté apnéique, qu’as tu prévu pour les mois à venir et surtout après une telle exposition médiatique ?

 Je suis en train de tenter le passage en pro. C’est un taf à temps complet. Déménager dans la région niçoise dans la foulée… Rebondir sur cette médiatisation aussi, pour que ça continu, et démocratiser l’apnée dans notre pays. Que de plus en plus de clubs voient le jour. Que de plus en plus de monde s’inscrive. C’est un sport qui plane dans l’inconscient collectif français, qui fascine tout le monde. Il manque peu de chose pour que ça s’embrase.
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10 – Le mot de la fin ?

Faite de l’apnée !

Merci à lui pour toutes ces infos et nous ne manquerons pas de le suivre la saison prochaine dans ses nouveaux projets.